« Bien ! Tu as amélioré ton FTP, tu es passé de 320w à 335w ! »
Mais qu’est ce qui a été amélioré concrètement ?
Le FTP regroupe 2 systèmes énergétiques qui fonctionnent toujours ensemble :
- Le système aérobie (Vo2max)
- le système anaérobie (VLamax)
Ces 2 systèmes ont chacun leur part de travail et l’un fonctionne plus ou moins que l’autre selon l’intensité et la durée de l’effort.
Beaucoup d'entre nous supposent que FTP nous indique le rythme que nous pouvons parcourir pendant une heure, lors d’un effort constant que l’on retrouve rarement sur des courses cyclistes.
Ces données semblent approximatives et non applicables dans tous les cas. Sommes-nous précis dans la manière d’utiliser cette méthode ?
Devrions-nous baser nos zones d’entrainements et l’évaluation de notre condition physique sur cette valeur ?
Qu’est-ce que le FTP ?
Par définition, FTP correspond à « la puissance la plus élevée qu'un cycliste peut maintenir dans un état quasi-stable sans se fatiguer pendant environ une heure », selon Coggan. De ce fait, "Lorsque la puissance dépasse FTP, la fatigue se produit beaucoup plus tôt, alors qu'une puissance juste en dessous du FTP peut être maintenue beaucoup plus longtemps."
Définition qui semble à première vue assez approximative pour une discipline comme le cyclisme qui requière une grande exigence et de la précision.
Le FTP est fonctionnel car il a une application pratique dans le monde du cyclisme basé sur la puissance, il permet des calculs rapides pour établir des zones d’entrainement.
Cependant, les valeurs de FTP ne sont pas sûr à 100% tout comme les zones d’entrainement calculées, basées uniquement sur des pourcentages.
Le protocole permettant d’obtenir FTP avec un test de 20min mis en place par Hunter Allen est le suivant : Puissance moyenne du test 20min multipliée par 95%. Physiologiquement, cette donnée n’est qu’une estimation de votre état d’équilibre métabolique et de vos systèmes énergétiques aérobies et anaérobies. En d’autres termes, la puissance maximale que vous pouvez maintenir pendant une heure n’est qu’une estimation.
Le temps exact est donc toujours inconnu.
Rappelons la définition de Coggan :
« La puissance la plus élevée qu'un cycliste peut maintenir dans un état quasi-stable sans se fatiguer pendant environ une heure. »
Un état métabolique stable n’existe pas, même à des intensités faibles à modérées, il y aura toujours des variations dans la consommation en O2, dans l’utilisation des substrats énergétiques, dans les taux de lactate et donc la part de contribution des systèmes énergétiques pendant l’effort.
Sur des intensités plus élevées, tous ces changements se font à des vitesses supérieures. C'est à dire que l'équilibre peut être vite rompu lorsque le coureur passe d'un effort "quasi stable" (comme à FTP) à un effort très intense (sprint long) synonyme d'accumulation rapide de lactate dans l'organisme. Ainsi l'énergie provient en grande partie du système anaérobie et l'effort devient très difficile voir impossible à tenir.
Deux seuils ventilatoires ?
Les scientifiques ont prouvé qu’il y avait deux seuils ventilatoires correspondant physiologiquement à une accumulation de lactate dans le sang.
Il existe le seuil ventilatoire 1 qui est l’intensité à laquelle il y a une accumulation constante du taux de lactate dans le sang. L’intensité est alors soutenue mais « facile » pour le corps à maintenir du fait de l’oxydation régulière du lactate par le système aérobie.
Ensuite intervient le seuil ventilatoire 2, lorsque l’intensité s’accroit. L’accumulation en lactates est beaucoup plus rapide. L’effort devient difficile à tenir et le système aérobie est mis à rude épreuve.
On peut identifier ici le seuil ventilatoire 2 au FTP, mais nous avons dans cette méthode aucune valeur de lactate.
Alors comment le mesurer de manière plus précise ?
L’état d’équilibre maximal du lactate est l’intensité à laquelle il y a un état d’équilibre métabolique à l’effort et que celui-ci peut être maintenu sans accumulation continue de lactate dans le sang. Cet état d’équilibre identifié comme le SV2 peut être mesuré en laboratoire, de manière classique en prenant régulièrement des mesures de lactates pendant différents tests.
Maintenant, grâce au logiciel INSCYD, ces données sont beaucoup plus accessibles et aussi précises qu’un test en laboratoire.
Quelles sont les limites de la méthode FTP ?
Tout d’abord, il est impossible de déterminer précisément FTP pour les raisons évoqués ci-dessus. Ensuite, Sebastian Weber, physiologiste et ancien entraîneur de Tony Martin et Peter Sagan nous apporte son point de vue :
« Premièrement, les exigences de la course ou d'un entraînement difficile doivent être prises en compte. Dans une course, ce qui est important, c'est d’être en mesure de produire de haut niveau de puissance, de se remettre d'efforts intenses, d'économiser des glucides, de sprinter et de gérer les demandes de ravitaillement. Pendant une course, un coureur ne roule jamais au FTP pendant plus de quelques secondes, il y a très souvent des changements entre différents systèmes énergétiques."
Pendant un effort, les trois filières métaboliques qui nous permettent de fournir de l’énergie interagissent et se chevauchent toujours. En fonction de l’intensité et de la durée de l’effort la part de celles-ci varie constamment.
« Les coureurs qui s'entraînent avec la méthode FTP ont un angle mort énorme, car ils ont tendance à ignorer la contribution aérobie par rapport à l'anaérobie à leur performance », explique Weber.
Selon lui, « Il est logique de décrire la charge d'entraînement comme un pourcentage du maximum, donc lorsque vous exprimez la charge d'entraînement en pourcentage de VO2max, vous obtenez la meilleure compréhension du stimulus d'entraînement que vous pourriez appliquer à votre système aérobie afin de le forcer à s'adapter ».
Dans le monde pro ?
En World Tour, les entraineurs utilisent leurs propres moyens pour déterminer les seuils et zones de leurs coureurs, principalement en utilisant la méthode de lactate. La plus précise de toute, cette méthode permet de déterminer à quelle puissance le coureur atteint Vo2max, les différents seuils et l’accumulation et clairance du lactate.
Dan Lorang, entraineur à l’équipe professionnelle Bora-Hansgrohe :
« Si je n'utilisais que la valeur FTP avec l'équipe, il me serait difficile de comprendre d'où vient la valeur, ou dans quelle direction dois-je faire progresser ce nombre. »
La méthode FTP nous donne seulement un niveau de performance sur des intervalles plutôt longs et constants. Mais lorsque l’athlète roule de manière saccadée comme sur une course de niveau régional ou lorsqu’il dépasse ce fameux FTP c’est le flou total.
Le FTP ne nous indique pas comment le corps réagit après 4 ou 5h de course à haute intensité et sur sa capacité à répéter des efforts violents très nombreux sur les classiques. C’est pourquoi les cyclistes et entraineurs ont besoin de plus qu’un nombre pour guider les entrainements et la physiologie lors de l’effort. La fréquence cardiaque est un bon indicateur de la charge interne lors d’une course mais à certaines limites (influencée par de nombreux facteurs ainsi qu’une grande inertie).
En résumé, le FTP est un outil très utile et rapide pour l’amateur qui souhaite savoir rapidement où il en est. Cependant, il doit être utilisé de la bonne manière.