La course à pied est une discipline sportive pratiquée par une grande part de la population française. Le nombre de pratiquant ne cesse d’augmenter. Chaque année presque cinq millions de français prennent le départ d’une course pour découvrir de nouvelles sensations en pratiquant régulièrement leur activité.
D’un point de vue physiologique, la performance en course à pied, ou plus généralement la performance en endurance est déterminée par 3 paramètres principaux. On distingue ; la consommation maximale d’oxygène (VO2max), la fraction du VO2max maintenu pour une durée donnée et enfin le coût énergétique, c’est-à-dire l’économie de course (Di prampero 1986). Le VO2max représente le volume maximal d’oxygène qu’une personne est capable d’utiliser par minute lors d’un effort maximal. La fraction de VO2max exprimée en %VO2max est le pourcentage de cette VO2max que la personne est capable de maintenir lors d’un effort sous-maximal sur une durée donnée. Enfin, le coût énergétique est la quantité d’oxygène consommée pour parcourir une certaine distance. Le rendement mécanique peut être comparé au coût énergétique dans la mesure où il correspond à la fraction d’énergie consommée pour produire un travail mécanique (Mayhew 1977). La notion de rendement est spécialement intéressante en pente, on parle alors de rendement contre la gravité mesuré comme étant le quotient entre l’énergie mécanique produite pour agir contre la gravité et l’énergie totale consommée que l’on mesure par la consommation d’oxygène (Praz 2011). En course à pied, on retrouve des pentes à forts pourcentages et des parcours avec un dénivelé important lors de course en pleine nature que l’on appelle le trail.
Le trail se démarque de la pratique standard de la course à pied par son type de terrain. Il est définit comme une manifestation pédestre se déroulant principalement en dehors des routes sans utilisation de matériel spécifique, sur un itinéraire balisé avec de fortes dénivellations (Depiesse 2018). A ce sujet, on observe rapidement que certains coureurs sont à l’aise en montée comparativement à d’autres coureurs qui sont à la peine plus rapidement, pour un même niveau à plat, et pour un même entraînement spécifique en côte (Balducci 2016). En effet, plusieurs facteurs seraient susceptibles d’intervenir ne permettant pas l’expression optimale des capacités physiologiques comme les paramètres anthropométriques et biomécaniques du sportif tels que sa technique de course. La fréquence et l’amplitude de foulée seraient réduites lors d’une course en montée, avec un temps de poussée plus long. L’angle du genou ainsi que l’angle de la hanche lorsque le pied arrive sous la hanche seraient également moins important (Slawinski 2008). La longueur et la fréquence des foulées dépendent de la pente. Sur une pente à +25 % et sur une population de traileur, Balducci et ses collaborateurs (2016) affirment que la fréquence des foulées est moins élevée comparativement à +12.5 et 0 %. Concernant l’amplitude des foulées, celles-ci sont moins longues comparativement aux deux autres pentes.
Lors d’un effort, le coût énergétique dépend principalement de la dépense d’énergie due au travail musculaire. En montée, celui-ci est de type concentrique, le muscle se raccourcit (Minetti 1994). En descente, lors d’une contraction excentrique, le muscle s’allonge. Durant la course à pied à plat, le rapport entre ces deux régimes de contractions musculaires est de 1 :1, la quantité de travail de ces deux types de contractions est identique, on doit autant accélérer que freiner (Praz 2011). À partir de +10% le rapport passe à 9 :1 (Minetti 1994). Ces deux types de contractions ne sont pas équivalents car la demande énergétique du travail concentrique est 3 à 5 fois supérieure au même travail excentrique (Pringle 2002), autrement dit, pour un effort donné le coût énergétique dépend de la proportion de chaque type de contraction.
L’activation musculaire concentrique serait plus importante en montée que sur le plat provoquant des tensions musculaires supérieures (Pringle 2002), le recyclage des déchets métaboliques serait également moins efficace tout comme le retour veineux en raison des changements de longueurs musculaires de plus faible importance lors d’une course en montée. Le muscle serait moins relâché et la vascularisation altérée (Laughlin 1999). Ces effets pourraient augmenter la part du processus anaérobie et accélérer la fatigue musculaire. La part des deux types de travail musculaire est modifiée en fonction de la pente (Minetti 1994). Pour des pentes supérieures à +15 %, le déplacement se fait uniquement par une accélération du corps, le travail excentrique et la capacité à utiliser l’énergie élastique est donc négligé. Pour toutes les pentes ascendantes, la quantité de travail à fournir pour un déplacement est dépendante de la gravité. C’est-à-dire que plus la pente sera raide, plus la quantité de travail à fournir sera grande. Ainsi, pour des pentes supérieures à +15 %, le coût énergétique augmente proportionnellement à celles-ci sans que la proportion de chaque type de travail, concentrique ou excentrique, ne soit modifiée (Praz 2011). La connaissance des capacités maximales et du potentiel d’un coureur doit être évalué aussi bien sur le plat qu’en montée s’il désire atteindre le meilleur niveau.
L’évaluation de la condition physique des sportifs devient obligatoire si celui-ci souhaite devenir plus performant et connaître plus spécifiquement son activité. Traditionnellement, l’évaluation des capacités aérobies est déterminée par des tests continus ou intermittents (sur terrain ou en laboratoire) pour obtenir une vitesse maximale aérobie (VMA) et le VO2max. Il existe notamment le test intermittent 45-15 qui consiste à courir pendant 45s alterné avec 15s de récupération proposé par Georges Gacon en 1994 ou le Vameval (Cazorla, 1990) qui est un test continu triangulaire. Le principal objectif de ces tests est l’évaluation de la capacité des athlètes à performer de manière répétée et d’évaluer son potentiel de récupération lors d’exercice intense.
En raison de l’importance à évaluer ces athlètes de manière à se rapprocher au plus près des spécificités de l’activité, quelques auteurs (Doucende 2017, Balducci 2016) ont su adapter ces tests en fonction des caractéristiques de terrain. Dans une récente étude Doucende et ses collègues (2017) ont mis en place un test progressif adapté aux traileurs : l’incremenTrail (IncT) basé sur la vitesse ascensionnelle (VA). Ce test permet d’évaluer les aptitudes physiologiques des athlètes en situation spécifique. Ce test a été réalisé sur une pente constante de +25 % sur tapis roulant ave une vitesse initiale de 500 m de dénivelé positif par heure. Les incréments sont de 100 m/h jusqu’à épuisement. Durant l’IncT, tous les critères d’épuisements permettant de valider un test maximal de l’aptitude aérobie ont été respectés (Lemmink et al 2004). Un quotient respiratoire (QR) supérieur à 1.1, un plateau de VO2max bien que l’intensité de course puisse continuer à s’accroître (Taylor et coll, 1955), une lactatémie maximale supérieure à 8μmol.L-1 , une fréquence cardiaque mesurée à la fin du test (Fc max) comparable (écart toléré de 10 bpm) à la Fc théorique calculée à partir de la formule de Spiro (1977) : Fc max = [210 – (0,65 x âge)], et enfin une impossibilité pour les sujets de maintenir l’allure malgré les encouragements.
La performance aérobie est dépendante de facteurs connus de la littérature : VO2max, coût énergétique et % VO2max. Cependant, la plus haute VO2 mesurée lors de course à pied en montée, comparativement au plat, évaluée par les premiers physiologistes a été plus récemment remise en question. Davies et collaborateurs (1974) affirme que le VO2max serait plus élevé à plat. En 2000, Paavolainen et collaborateurs montrent le contraire, le VO2max serait plus élevé en montée. Il n’y aurait, pour le moment, pas de consensus à ce sujet. Concernant le coût énergétique en montée, celui-ci est corrélé avec l’augmentation de la pente et de la vitesse (Olesen, 1992). Balducci et collaborateurs (2016), affirment que les coûts énergétiques en pente sont bien corrélés (un athlète avec un coût faible à +12,5% a aussi un coût faible à +25% et vice versa).
Mais l’économie de course à plat n’est pas corrélée à l’économie de course en montée. En conséquence, deux athlètes ayant les mêmes VO2max et un coût énergétique identique à plat ne feraient pas la même performance sur la même course en montée à intensité identique. Sur un ultra trail (75km et 3700m de dénivelé positif), Balducci et collaborateurs (2017) ont proposé que la performance est dépendante de nombreux facteurs. En effet, dans un groupe hétérogène de coureur d’endurance en montagne, la performance en trail dépend de la VMA, de la fraction de VMA et de la force des extenseurs du genou. Selon cette étude, les athlètes de haut niveau en trail auraient une masse musculaire élevée au niveau des membres inférieurs et un coût énergétique plus élevé que les athlètes de haut niveau sur route sur des courses à plat. Ainsi, sur une population hétérogène de traileurs, l’économie de course ne serait pas un facteur clé de la performance. Les capacités aérobies maximales des coureurs de trail deviennent pertinentes à évaluer sur un test spécifique afin de connaitre les aptitudes d’un coureur à être performant lors d’une course de montagne.
Le but de cette étude est d’établir un test VMA basé sur une vitesse ascensionnelle, exprimée en km.h-1, permettant de traduire les critères traditionnellement utilisés à l’entrainement en se rapprochant au plus près des exigences de l’entrainement en trail. Ce test sur tapis roulant devra être facilement reproductible et standardisé. Nous comparerons ensuite la performance d’un groupe de coureur de niveau homogène sur un test VMA à plat et à une pente de +20 % sur tapis roulant. D’autres mesures telles que la force maximale et la puissance des membres inférieurs seront également faites permettant de savoir si la performance en trail est liée à des capacités neuromusculaires bien spécifiques. Nous avons émis l’hypothèse que le test VMA a +20% permettrait d’évaluer spécifiquement les capacités physiologiques d’un coureur de trail.
Dix sujets masculins entrainés en endurance ont participé à cette étude (âge : 28,2 ± 5,2 ans ; taille : 181,7 ± 5,5 cm ; poids : 72,7 ± 8 kg ; VO2max : 69,8 ± 3,6 ml.kg-1.min-1). Ils devaient être en bonne santé et pratiquer la course à pied de manière régulière (volume d’entrainement total comprit entre 8 et 15 heures).
Les sujets ont réalisé trois sessions d’exercices. Deux tests triangulaires incrémentaux et continus ont été effectué sur tapis roulant à plat et à une pente de +20 % (voir partie 2.3) et ont permis d’évaluer la vitesse maximale aérobie (VMA) spécifique au test, la VO2max et la fréquence cardiaque maximale. Ensuite les sujets ont réalisé une dernière session sur ergomètre isocinétique (BIODEX) mesurant la force maximale et la résistance à la fatigue des quadriceps ainsi que des tests de détente sur Optojump (Optojump Next).
Pour chaque test, il a été demandé aux sujets de ne pas effectuer d’entrainement intensif au moins 48 heures avant chaque test.
Les deux tests ont été réalisés sur un tapis roulant motorisé (HP Cosmos mercury med).
Le test VMA à 0 % est un test triangulaire et continu (VAMEVAL). La vitesse de départ a été fixée à 8 km.h-1 avec des incréments de 0,5 km.h-1 toutes les minutes. A chaque fin de palier, les sujets devaient exprimer leur ressenti de la difficulté de l’effort à l’aide de l’échelle de Borg (1998) permettant de contrôler que le test soit maximal.
Le test VMA à 20 % mesurant une vitesse ascensionnelle reprend les mêmes critères que le test VMA à plat. En revanche, la vitesse de départ a été fixée à 2 km.h-1 avec des incréments de 0,5 km.h-1 toutes les minutes comme le préconise Doucende (2017) dans son étude sur l’IncremenTrail, un test progressif spécifique au trail basé sur une vitesse ascensionnelle. La même échelle de Borg a été utilisée. Les échanges gazeux ainsi que la fréquence cardiaque ont été mesurées pendant ces deux tests.
Les échanges respiratoires ont été mesurés, cycle par cycle, à l’aide d’une unité portable Cosmed K5 (COSMED, Rome, Italie), puis moyennés toutes les 15 s. Avant chaque mesure, quatre calibrations ont été effectuées dans l’ordre suivant : calibration de la turbine du K5 avec une seringue d’un volume de 3 litres (Quinton Instruments, Seattle, Wash, USA) ; calibration des analyseurs d’O2 et de CO2 à l’aide d’un mélange gazeux d’une concentration de 16 % O2 et de 5 % de CO2 ; calibration du délai ; calibration de l’air ambiant. La fréquence cardiaque a été enregistrée au moyen de cardio-fréquencemètres (Garmin).
Cette session était composée d’un échauffement de 5 minutes à 100 Watts sur ergocycle puis d’un test counter-movement jump (CMJ) sans l’aide des bras et d’un squat jump (SJ). Les sujets devaient respecter des consignes particulières permettant une réalisation la plus optimale possible sans mouvement parasite. En effet, l’écartement des pieds devait être égal à la largeur du bassin, le regard fixé à l’horizontal. Le départ du mouvement était effectué sans les bras, les mains posées sur les hanches. Le CMJ devait être réalisé le plus rapidement possible en veillant à exécuter une flexion (angle genou à 90°) puis une extension en minimisant au maximum le temps entre les deux actions. Le SJ reprend les mêmes caractéristiques d’exécution que le CMJ mais en variant la position de départ : Mains sur les hanches avec un angle cuisses – membres inférieur de 90°.
Après de brèves répétitions permettant de s’approcher au plus près des conditions d’exécutions citées ci-dessus, la meilleure performance en centimètres a été enregistrée. Le nombre de saut maximum ne dépassant pas cinq avec une minute de repos entre chaque saut.
Après quelques minutes de récupération, les sujets étaient assis sur le siège d’un ergomètre isocinétique BIODEX, et sanglés fortement au dossier. Leurs mains étaient accrochées aux sangles au niveau de leur poitrine pendant les tests.
La jambe droite, définie par convention, était sanglée au bras de l’ergomètre quelques centimètres au-dessus de la malléole. L’angle du genou était fixé à 90° et son axe aligné avec celui du bras de levier.
Les tests pratiqués consistaient à développer le plus de force possible (force maximale volontaire) suivant deux vitesses : Tout d’abord en isocinétisme actif (concentrique) à une vitesse de 60 °/s et de 120 °/s sur les muscles Quadriceps. Les sujets avaient pour consignes de réaliser des mouvements enchainés et continus en veillant à conserver une amplitude maximale (venir jusqu’aux butées inférieures et extérieures).
Chaque modalité était précédée d’un échauffement permettant aux sujets de ne pas être surpris et d’être efficace dès le lancement. Celui –ci s’est déroulé selon la trame suivante :
Vitesse (°/s)
Répétitions
240
12
180
8
120
6
60
6
120
TEST
60
TEST
Cet échauffement était réalisé dans les mêmes conditions que le test mais à des intensités moins élevées pour ne pas avoir les effets de la fatigue. Lorsque les sujets ne parvenaient plus à avoir des valeurs de forces supérieures à celles préalablement enregistrées, le test se terminait. Les mesures ont été réalisées en Newtons-mètres.
Après un délai de récupération, un test isocinétique à une vitesse angulaire de -60°/s a été réalisé en reprenant les mêmes critères que le test précédent. Le protocole est le suivant :
Vitesse (°/s)
Répétitions
-60 °/s
6
-60°/s
TEST
Le dernier test isocinétique réglé à une vitesse de 60°/s permettait de vérifier l’apparition de la fatigue musculaire. Les sujets devaient effectuer 30 répétitions maximales enchainées.
L’ensemble des données sont présentées dans le texte sous la forme : moyenne ± erreur standard. Pour réaliser ces analyses statistiques le logiciel statistica (Statsoft.com 2011) pour windows a été utilisé. Le test de Tukey a permis de comparer les variables VO2max et FC max. Les paramètres neuromusculaires ont été comparés avec un test ANOVA après avoir vérifié que l’ensemble de nos données suivaient une distribution normale. Le taux minimum de significativité (p < 0,001) a été retenu pour identifier des différences significatives entre les tests. L’analyse de régression linéaire a été utilisée pour indiquer des corrélations entre les valeurs de VMA et les paramètres neuromusculaires.
3.
Les figures 1 et 2 montrent que les valeurs moyennes du VO2max sur le test à plat (68,1 ± 6 ml.kg-1.min-1) et sur le test à +20% (69.8 ± 3,6 ml.kg-1.min-1) ne présentent pas de différences significatives (p = 0,3). Les résultats sont similaires pour les fréquences cardiaques moyennes enregistrées sur le test à plat (184,7 ± 8.1 bpm) et le test a +20% (182.7 ± 8.5 bpm) (p = 0,08).
Figure 1 : VO2max moyenne sur les tests à 0% et 20%
Figure 2 : Fréquence cardiaque moyenne sur les tests à 0% et 20%
Concernant les VMA des sujets, on observe une différence significative entre les VMA mesurées à plat et à +20% (figure 3 ; p = 0,16). A plat, les valeurs de VMA et de VO2max ne sont pas significativement corrélées tout comme les valeurs de VMA à +20% et les VO2max mesurées sur le même test (R2=0,14).
Figure 3 : VMA moyenne à 0% et à +20%
Les valeurs de détente CMJ et SJ (30 ± 1.9 cm et 27 ± 1.9 cm) ne sont pas corrélées aux valeurs de VMA des sujets que ce soit à plat ou à + 20%. On observe des résultats similaires sur le test de trente répétitions reflétant l’apparition d’une fatigue. Il n’y a pas de corrélation significative avec les valeurs de VMA des sujets à plat et à +20% bien qu’il y ait une tendance à ce que les sujets ayant des VMA supérieures ou égales à 9.5 km.h-1 aient également la plus faible diminution de force (fig 4 et 5). L’analyse statistique n’a pas montré de corrélation significative entre le pic de force aux différentes vitesses angulaires (60°/s ; 120°/s et -60°/s) et les valeurs de VMA des sujets (respectivement R2 = 0,18 ; R2 = 0,3 et R2 = 0,04 pour VMA20% et R2 = 0,008 ; R2 = 0,0002 et R2 = 0,01 pour VMA0%).
Figure 4 et 5 : Indice de fatigue moyen en fonction des valeurs de VMA
L’objet de cette étude était d’établir un test VMA sur tapis roulant basé sur une vitesse ascensionnelle exprimé en km.h-1 se rapprochant au plus près des exigences terrain de la course en pleine nature. Le trail est une activité durant laquelle le coureur doit adapter sa biomécanique de course en fonction des spécificités du terrain. Sur une population de non spécialiste comprenant des coureurs de 800m et 1500m ainsi que des triathlètes et des skieurs pratiquant le cross-country, Paavolainen et collaborateurs (2000) ont montré que les facteurs limitants la performance seraient différents de ceux observés à plat (dans cette étude : la pente était de 0 et +7%). Les valeurs maximales de VO2, la ventilation et la concentration sanguine en lactate seraient supérieures sur un test maximal en côte.
Nos résultats montrent que les valeurs de VO2max et les fréquences cardiaques maximales sont identiques entre le test à plat et le test à +20% bien qu’il y ait une tendance à ce que les VO2max enregistrées en montée soient plus hautes que celles que l’on retrouve sur le test à plat. Dans leur étude, Paavolainen et collaborateurs (2000) ont trouvé des VO2max significativement différentes. Ces différences pourraient refléter une implication plus importante des masses musculaires (Olesen 1992) et différents types de fibres musculaires (Costill et al. 1974) pendant une course en montée. De plus, la population choisie par Paavolainen n’était pas des spécialistes de trail, ceci pourrait expliquer le fait qu’il ait trouvé des différences significatives dans les valeurs de VO2max des sujets. Les triathlètes étant principalement des coureurs sur route plate, la biomécanique de course est différente et moins susceptible de varier en fonction de la typologie du terrain. Concernant les VMA enregistrées, les VMA0% sont plus importantes que les VMA20%. Les VMA20% sont en moyenne deux fois moins élevées que les VMA à plat pour ce groupe d’athlète.
Pour un coureur ayant une VMA à plat comprise entre 18 et 21km.h-1, il est donc possible d’estimer la vitesse à laquelle il peut courir sur une pente de +20% au maximum de ses capacités aérobies en extrapolant les valeurs de VMA à 0%. On retrouve également une tendance à ce que les coureurs ayant des VMA à plat élevée aient aussi des VMA20% supérieures ou égales à 9.5km.h-1 soit 1900m de dénivelé positif en une heure. Des résultats supplémentaires sont nécessaires pour permettre de valider ou non cette tendance.
Nos résultats permettent de valider l’hypothèse selon laquelle le test VMA continu et triangulaire sur tapis roulant dont la pente est de +20% avec des incréments de +0.5km.h-1 par minute est un test valide et facilement reproductible permettant d’évaluer les capacités physiologiques des coureurs de trail, au même titre que les coureurs sur route sur un test sur tapis roulant à plat (Vameval, Cazorla 1990). En perspective, avec ce test VMA basé sur une vitesse ascensionnelle, les coureurs d’endurance en montagne pratiquant le trail seront en mesure de connaitre leurs capacités maximales aérobies spécifiques à l’activité et d’optimiser leur entrainement.
Les valeurs de force maximale à 60°/s 120°/s et -60°/s et de détente (CMJ et SJ) n’ont pas montré de corrélation avec les valeurs de VMA ou de VO2max à plat et à +20% des sujets. Les qualités de détente n’influenceraient pas la VMA. On observe une tendance à ce que les sujets ayant la meilleure VMA20% aient également la plus faible diminution de force sur le test de trente répétitions. Par exemple, 5 sujets ont une VMA20% de 9km.h-1. Pour ces coureurs, la perte de force sur les trente répétitions est plus importante (-37 ± 11.4 %.), contre -26 ± 6.5% pour les sujets ayant une VMA20% de 9,6km.h-1, soit un écart de 11% entre ces deux groupes. La limite de ce test est le nombre limité des sujets car afin de valider ou non cette tendance, d’autres coureurs de différentes disciplines non spécialiste de trail pourraient réaliser ces tests afin d’avoir des résultats supplémentaires et de connaître plus précisément les facteurs de la performance en trail.
Concernant les tests maximaux effectués à différentes vitesses angulaire, la force maximale des extenseurs du genou ne serait donc pas un facteur déterminant de la performance en montée sur des pentes supérieures à +15% sur une population homogène d’athlète de haut niveau. En revanche, la résistance à la fatigue musculaire serait un facteur de performance en trail comme le montre Balducci et ses collaborateurs (2017) dans un groupe hétérogène de coureurs d’endurance en montagne. Selon sa récente étude, la performance en trail est dépendante de nombreuses variables dont la résistance à la fatigue musculaire évaluée avec un test de force maximale volontaire isométrique des extenseurs du genou effectué un jour avant et juste après l’épreuve (75km pour 3700 de dénivelé positif et 3930 de dénivelé négatif). Ces tests ont été effectué en isométrie ce qui présente une limite à cette étude car la force maximale volontaire est définie sur un angle particulier et dans en condition d’ischémie. C’est-à-dire que d’autres facteurs tels que la vascularisation, l’effet de pompe musculaire, l’oxydation des substrats et le recyclage des déchets métaboliques que l’on retrouve lors d’un effort dynamique sont peu prit en considération.
Ces résultats semblent similaires à notre tendance observée sur le test de résistance à la fatigue de trente répétitions. La course en montée nécessite le développement de tensions musculaires supérieures par rapport à une course à plat (pringle 2002). L’efficacité de la pompe musculaire serait moins bonne en raison des changements des longueurs musculaires de plus faible importance (Laughlin et Schrage 1999). Le retour veineux serait moins efficace tout comme le recyclage des déchets métaboliques dans le milieu extracellulaire. Ces effets pourraient augmenter la part du processus anaérobie et accélérer la fatigue et éventuellement augmenter le recrutement des fibres de type II (Moritani 1987). De ce fait, un coureur ayant la capacité à optimiser ces paramètres serait en mesure de résister à la fatigue et d’être performant sur une compétition en montée de type kilomètre vertical ou lors d’un trail. Les coureurs habitués des courses en montagnes seraient donc plus efficient qu’un coureur non spécialiste lors d’une course en montée.
Le test VMA20% effectué sur tapis roulant basé sur une vitesse ascensionnelle est un test valide et facilement reproductible par les athlètes et les entraineurs afin d’évaluer les capacités maximales aérobies des coureurs spécialisés dans le trail. La vitesse de départ doit être de 400 mètres de dénivelé positif en une heure soit 2km.h-1 avec des incréments de +100 mètres de dénivelé par minute soit 0.5km.h-1. Le test de l’indice de fatigue semble montrer des tendances selon lesquelles la performance lors d’une course en montée et plus généralement en trail serait dépendante de la capacité à conserver une bonne efficacité musculaire lorsque les pentes dépassent +15% et que les tensions musculaires deviennent importantes.
En perspective, la connaissance de la VMA20% pour un athlète ou un entraineur permettrait d’optimiser la gestion de l’entrainement et d’optimiser la préparation d’un athlète afin de produire la meilleure performance possible lors d’une compétition.
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